Concours Salons
01 décembre 2022Entretien avec Cédric Exare, sacré Meilleur Espoir National au Grand Concours Floral Inteflora
Suite et fin de notre dossier consacré au Grand Concours Floral Interflora qui s’est déroulé fin octobre au Château de Chenonceau. A l’issue de la compétition et de deux jours d’épreuves, Cedric Exare a été sacré Meilleur Espoir National qui a su séduire un jury de professionnels reconnus pour leur expérience. Le public, venu en nombre pour l’événement, a aussi pu donner son avis sur les réalisations des candidats avec le « Coup de cœur du Public ». Cedric Exare décroche, avec cette première place, son ticket pour la prochaine Coupe de France. Son parcours, sa participation au concours, son travail et ses futurs projets, Cedric Exare a accepté de répondre à nos questions. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et expliquer votre parcours ? Quel est le sens pour vous de participer à des concours ? J’ai démarré mon apprentissage à l’âge de 15 ans. Je suis, donc, dans le métier depuis plus de 17 ans. J’ai eu un parcours classique CAP, BP et Brevet de Maitrise. En parallèle, j’ai participé à beaucoup de concours. Je suis allé plusieurs fois en Coupe de France et je suis lauréat de la Coupe Ile-de-France et de la Coupe Piverdie Senior. Je suis chef d’entreprise depuis 9 ans maintenant avec la création de ma structure à Sucy-en-Brie. Je suis un compétiteur dans l’âme, j’ai toujours besoin de m’évaluer et de me comparer aux autres. Les concours me permettent d’apprendre : apprendre des autres, apprendre de mes erreurs et, ainsi, toujours évoluer. Qu’avez-vous ressenti lors de votre participation à la Coupe Espoir National ? Etiez-vous stressé avant que la compétition commence ? A chaque début de concours, je suis toujours stressé. J’ai le syndrome de la feuille blanche. Cela a été le cas avant cette finale : à une semaine de la préparation du concours, je trouvais que mes idées n’étaient pas bonnes. Comme il y avait un sujet libre à préparer, c’était très inquiétant. J’avais hésité à faire le concours car j’ai eu une saison compliquée. Mais je me suis dit, après tout, il faut se lancer. Le but était d’apprendre encore et de me faire plaisir. J’étais soutenu par le Club Interflora de Paris. Il y avait donc une attente car il y a énormément d’acteurs sur la région. J’avais beaucoup de pression sur les épaules. Ce qui était un facteur de stress pour moi. Comment arrivez-vous à passer au-dessus de ce syndrome de la page blanche ? Je pense que je suis meilleur dans l’urgence et c’est difficile car pour ce type de sujets, ce sont des heures de travail qui, normalement, s’échelonnent sur plusieurs semaines ou plusieurs mois. En général, je finis par tout faire en une semaine et je dors donc très peu. C’est l’approche de la deadline (date limite) qui amène finalement l’inspiration. Cela arrive souvent bien trop tard mais j’arrive toujours à m’en sortir. Lors de ce concours, quel a été le moment le plus marquant pour vous ? Et le plus déstabilisant ? Le moment le plus marquant a sûrement été le fleurissement de la pièce libre car je l’avais préparée dans l’urgence et je n’avais pas forcément eu le temps de m’entrainer. C’était déstabilisant parce que, de ce fait, je n’avais pas de repères pour me rassurer. Mais chaque épreuve est déstabilisante, surtout les épreuves de piquées car ce sont les épreuves où je suis le moins à l’aise. J’essaye de fractionner les choses dans ma tête : dès qu’une épreuve est finie, je passe à la suivante. Je fonctionne comme ça depuis peu de temps, mais je pense que c’est aussi la maturité acquise avec les concours. Auparavant, j’avais du mal à me ressaisir quand j’avais raté une épreuve. J’ai appris avec l’expérience que c’est la régularité qui paie. Il faut bloquer son esprit et passer à l’étape suivante. Vous avez été sacré Champion d’Ile-de-France et médaillé de bronze à la Coupe de France des Fleuristes. Vous venez de remporter la Coupe Espoir National Interflora. Quelle est la prochaine étape ? Avez-vous d’autres participations à des concours de prévues ? J’ai déjà fait une pause avant et après le Covid. Je suis allé un peu « au bluff » aux sélections régionales de la Coupe Espoir. Je me sentais un peu rouillé car je n’avais pas fait de concours depuis 2-3 ans et ça me manquait. Je passais les sélections du Meilleur Ouvrier de France en mai dernier avec des sélections régionales qui ont aussi été l’occasion de me remettre dans le bain. J’y allais sans grande conviction de gagner, je voulais surtout m’entrainer mais j’ai été sélectionné et j’ai gagné la finale. La prochaine étape sera la Coupe de France 2023 pour laquelle je suis d’ores et déjà qualifié. Le graal reste le col Bleu-Blanc-Rouge. J’ai d’ailleurs pu côtoyer des Meilleurs Ouvriers de France pendant des concours ou lors de mes coachings des Meilleurs Apprentis de France. A chaque fois que je vois ce col et cette médaille, cela me fait rêver. J’ai passé les sélections en mai mais je n’étais pas du tout prêt, je n’y allais pas gagnant et, effectivement je ne me suis pas donné à 100%. Ce n’est que partie remise. Cela reste un but. Si vous deviez définir votre art floral en quelques mots, quels seraient-ils ? J’ai commencé dans le monde des concours comme un outsider. Souvent les personnes qui font des concours sortent de grandes maisons de la fleuristerie. Elles ont souvent travaillé chez des Meilleurs Ouvriers de France ou des Champions de France. Je venais de nulle part. Personne ne me connaissait et personne n’aurait misé sur moi lorsque j’ai gagné la Coupe Ile-de-France. Ce concours a été révélateur car je prends à souvent contrepied le sens de la marche. Lors de cette compétition, quand je suis rentré chez moi, j’ai dit à mes parents que j’étais soit premier, soit bon dernier parce que sur chacun des sujets, j’avais été à l’inverse de tout ce qui avait été fait. Cela m’a servi pour la Coupe Ile-de-France mais cela m’a aussi desservi. Je pousse parfois la réflexion très loin et je peux donc aussi être à côté de la plaque. C’est un art floral inattendu, d’outsider. Vous êtes très actif sur Instagram où vous publiez beaucoup de vos créations notamment des décors floraux pour les vitrines des commerces ou encore des végétalisations de boutiques. D’où vous vient cette envie d’aller toujours plus loin dans vos créations florales ? Je me suis orienté vers la fleur au départ au hasard. Ma passion pour ce métier s’est révélée lors de mon stage en entreprise de 3ème. J’ai été chez un artisan fleuriste qui tenait une petite boutique. Elle m’a laissé tout faire. Ce qui m’a toujours plu c’est de la créativité permanente. Le côté éphémère de notre métier renforce encore plus cet aspect. Au bout d’une semaine ou deux, tout a disparu et c’est cet aspect créatif du métier qui m’a plu. J’ai travaillé 4 ans en atelier d’événementiel, j’ai eu la chance de fleurir des hôtels de luxe et des palaces pour lesquels on devait produire de gros décors. Pour les décors, j’ai eu la chance pouvoir travailler avec la Chambre de métier qui m’a laissé créer des décors d’estrade. J’ai été repéré sur Instagram par des photographes qui m’ont appelé pour des photo sets ou pour des shootings de marques. Je m’oriente aussi vers le floral make-up (maquillage floral). Tout est parti au départ du mouvement Movember. Plutôt que de me laisser pousser la moustache, j’ai fait une moustache en fleurs que j’ai publiée sur Instagram. Cette photo a été reprise par Movembre. Suite à l’engouement qui en a résulté, j’ai créé aussi des barbes. De fil en aiguille, j’ai été repéré par un chorégraphe et une directrice artistique qui m’ont permis de travailler sur des plateaux de télévision comme l’Eurovision et la promotion d’artistes. Cela me permet de m’amuser et de détourner l’art floral. Cela m’ouvre d’autres portes, je participe au show floral pour la remise des Graines d’Or. Je fais partie des cinq designers sélectionnés. Cette envie d’aller plus loin vient de ce stage de 3ème et de mon parcours atypique. J’ai été dans un atelier avec 26 personnes, je me suis auto-formé et je n’ai eu de maitre d’apprentissage derrière moi. Je me suis forgé tout seul. J’ai eu un parcours atypique qui m’a permis de voir beaucoup de choses, d’apprendre toujours plus et de pousser la créativité encore plus loin. Au-delà des concours, quels sont vos projets pour l’avenir ? Je donne des cours également en école, je suis professeur d’Art Floral. Cela me prend beaucoup de temps mais je ne m’arrête jamais entre ma boutique, les cours et l’organisation des concours. La transmission m’a toujours manqué lorsque j’étais apprenti donc cela m’a donné envie de transmettre. Dès que j’ai l’opportunité, je corrige des examens, des concours, j’entraine des jeunes. C’est vraiment quelque chose qui me fait vibrer. A très long terme, plus dans 15-20 ans, je pense que j’aimerais beaucoup changer d’air et, pourquoi pas, partir à l’étranger pour faire-valoir l’art floral français. Avoir une boutique implantée à l’étranger, travailler sur le make-up à l’étranger, j’ai une envie d’exporter l’art floral français et je pense qu’on en a besoin. Un dernier mot pour la fin ? Je voulais remercier mes partenaires grossistes pour leur soutien sur chaque concours et ma famille qui subit tous mes concours. Et il y en a eu beaucoup, peut-être trop à leur goût ! Je voulais aussi remercier énormément le club Interflora de Paris présidé par Yannick le Saux, qui m’a énormément soutenu pour cette finale. Et évidemment, un grand merci à mon équipe de choc Camille Saba et Ambre Usmati.